AGI- La récente décision du ministère français de l'Agriculture d'interdire l'importation des produits chocolatés algérien "al-Marjane" (Al-Mordjene) a suscité un vif débat en Algérie. L'écho de la querelle a déjà traversé les Alpes jusqu'en Italie, la patrie de la reine mondiale des crèmes à la noisette et au chocolat : le Nutella.
Le président de l'Organisation nationale de défense des consommateurs, Mustapha Zebdi, a accusé les lobbyistes français d'entraver la diffusion du produit algérien, soulignant que l’interdiction est basée sur un article de la loi européenne relative à l'importation de produits animaux et dérivés du lait destinés à la consommation humaine (art. 20, paragraphe 3, du règlement européen n° 1. 2020/2292). Zebdi a observé que le chocolat "Marjane" était déjà disponible sur les marchés européens, laissant entendre que des mesures auraient été prises pour bloquer son importation une fois que le produit est devenu trop compétitif par rapport aux produits locaux. Et, en effet, les sites d'information sectorielle comme foodaffairs aussi bien que les médias généralistes, comme EuropeToday, ont bien souligné que la crème al-Marjane est déjà largement diffusée sur les marchés français et européen en raison de son prix très compétitif par rapport à d'autres firmes alimentaires 'blasonnées'.
A ce propos, le site d'information "Tout sur l'Algérie" rapporte que des navires conteneurs remplis de crème à tartiner "Marjane" ont été saisis au port de Marseille le 13 septembre dernier. Le chocolat, très populaire en France ces derniers mois grâce aux réseaux sociaux, était vendu à des prix élevés dans les magasins spécialisés en produits algériens. De son côté, le gouvernement français affirme qu’Alger ne respecte pas toutes les réglementations européennes en matière de santé animale et de sécurité alimentaire pour l'exportation de produits contenant des produits laitiers.
La pâte à tartiner algérienne El Mordjene continue de faire parler d’elle en France où certains médias tentent de minimiser son succès.
— TSA Algérie (@TSAlgerie) September 18, 2024
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Par conséquent, l'importation de la crème "Marjane" n'est pas autorisée dans le cadre législatif actuel. Auparavant, la chaîne française de supermarchés "Carrefour" avait annoncé son intention d'inclure les produits "Marjane" dans ses magasins, mais l'initiative semble désormais compromise en raison de l'interdiction.
Le conflit commercial intervient dans un contexte de fortes divergences entre la France et son ancien territoire métropolitain d'Afrique du Nord. Le 30 juillet dernier, Macron a annoncé la reconnaissance du Plan d'autonomie du Maroc pour le Sahara occidental, une décision qui a conduit le gouvernement algérien à retirer son ambassadeur à Paris. Macron avait déjà remis en question l'existence d'une nation algérienne avant la colonisation lors de son premier mandat, provoquant le rappel de l'ambassadeur d'Algérie à Paris pour trois mois à l'automne 2021 et une interdiction de survol de l'espace aérien algérien aux avions militaires français engagés au Sahel. A cela s’ajoute un autre sujet épineux : celui du “dossier de la mémoire” et de l’histoire des “crimes coloniaux” au XIXe siècle. En 2020, la France a remis à l'Algérie les restes de 24 résistants tués au début de la colonisation française de ce pays d'Afrique du Nord, qui a duré 132 ans, de 1830 à 1962. L'Algérie continue cependant de demander le retour de “tous les crânes” qui sont conservés dans des musées, afin de pouvoir les enterrer.
Bref, l'affaire de la crème au chocolat algérienne risque de devenir un nouveau "casus belli" dans les relations - pas trop "sucrées" - entre les deux pays. Cette dispute fera certainement parler les Italiens, inventeurs mondialement reconnus des meilleures crèmes au chocolat grâce aux précieuses matières premières utilisées comme les noisettes du Piémont (ou les pistaches de Bronte). "Al-Marjane" deviendra donc un concurrent redoutable du Nutella ? Qu'il s'agit de la France ou de l'Italie, Bruxelles, arbitre chargé de faire respecter les normes, aura sans doute le dernier mot.