(AGI) - Dans un monde multipolaire de conflits et de changements rapides, l’Afrique a un rôle à jouer dans les organisations internationales, à commencer par l’Onu, en devenant un acteur à part entière de la diplomatie globale.
Un changement de perspective de plus en plus nécessaire affronté par le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, qui appelle à une réforme urgente du Conseil de sécurité afin de remédier à sa structure obsolète et à l'absence de représentation africaine.
Dans un discours prononcé il y quelques heures durant une réunion du Conseil convoquée par la Sierra Leone, le numéro 1 de l’ONU a souligné que la composition du Conseil de sécurité reflète l'équilibre des pouvoirs à la fin de la Seconde Guerre mondiale, ce qui nuit à la credibilité de l'organisation - qui n'a pas su s'adapter à l'évolution du monde - et à sa légitimité mondiale. "En 1945 (date de sa création), la plupart des pays africains étaient encore sous domination coloniale et n'avaient pas voix au chapitre dans les affaires internationales", a déclaré le secrétaire général. "Nous ne pouvons pas accepter que le principal organe de paix et de sécurité du monde n'ait pas une voix permanente pour un continent de plus d'un milliard d'habitants, ni que les points de vue de l'Afrique soient sous-estimés dans les questions de paix et de sécurité, à la fois sur le continent et au niveau mondial", a insisté Guterres. Il a également suggéré que "pour garantir la pleine crédibilité et la légitimité de ce Conseil, il est nécessaire d'écouter les appels de l'Assemblée générale des Nations unies, de divers groupes géographiques - du groupe arabe au Benelux, aux pays nordiques et à la Caricom - et de certains membres permanents de ce même Conseil, afin de corriger cette injustice".
Même son de cloche du gouvernement italien, par le biais de son ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale, Antonio Tajani, intervenu à la journée consacrée à la diplomatie du Festival du film de Locarno, qui se déroule actuellement dans la ville suisse. “Nous sommes favorables à un renforcement du rôle des pays africains au sein de l'Onu", a déclaré le chef de la diplomatie italienne, en argumentant qu’en 2050, il y aura 2,5 milliards d'Africains et nous devons faire de l'Afrique une opportunité pour le monde entier.
Selon lui, dans un monde en mutation, "penser que l’Afrique représente un problème pour le monde entier serait une grave erreur. C’est pourquoi il faut travailler dur avec la diplomatie”. Pour Guterres comme pour Rome, la réforme du Conseil de sécurité est l'une des priorités à poursuivre, au centre du débat international dès le début des années 1990 et en 2009 une Négociation intergouvernementale a été mise en place avec la participation de tous les États membres.
Depuis lors, les sessions de négociation ont permis d'identifier d'importants domaines de convergence, mais aussi la persistance de points de vue différents. Comme la nécessité d'un élargissement significatif du Conseil afin d'assurer une représentation plus équitable des 193 États membres, l'importance de modifier la sous-représentation régionale actuelle (en particulier de l'Afrique, de l'Asie-Pacifique et de l'Amérique Latine) et les idées visant à améliorer les méthodes de travail du Conseil afin de le rendre plus transparent et plus inclusif vis-à-vis de l'Assemblée générale, des autres organes des Nations unies, des États membres et des organisations régionales.
Dans le cadre des négociations, l'Italie exerce le rôle de "point focal" du groupe Uniting for Consesus (Ufc), qui réunit différents pays qui s’oppose à la création de nouveaux sièges permanents attribués à des pays, afin d'éviter de créer de nouvelles positions privilégiées au sein de la communauté internationale, au détriment des intérêts généraux de l'ensemble des membres de l'ONU. Le groupe a proposé en 2014 une nouvelle formule ("approche intermédiaire") centrée sur la création de nouveaux sièges "à long terme", attribués à des groupes régionaux (et non pas à des pays) avec la possibilité d'une réélection immédiate (aujourd'hui exclue par le statut de l'ONU). Le groupe espère ainsi trouver une solution qui puisse répondre aux besoins des pays qui aspirent à être présents plus longtemps au Conseil de sécurité en raison de leur engagement international croissant et, en même temps, d'offrir à l'ensemble des 193 États membres de l'ONU une plus grande rotation.
Une première avancée significative devrait arriver du "Sommet de l'avenir de l'Onu: des solutions multilatérales pour un avenir meilleur", des 22 et 23 septembre 2024 à New York, en parallèle de la 77ème Assemblée générale des Nations Unies. Le "Nouvel agenda pour un nouveau monde", projet politique de Guterres lancé en juillet 2023, servira de base aux négociations sur le "Pacte pour l'avenir", pour "progresser sur toutes ces questions et contribuer à faire en sorte que tous les pays puissent participer de manière significative aux structures de gouvernance mondiale sur un pied d'égalité", a projeté Guterres.