AGI - Un G7 Agriculture qui s’ouvre également à l’Afrique est un fait significatif qui fait d’un continent dont les côtes nord ne sont qu’à quelques kilomètres de Syracuse, la ville sicilienne accueillant les événements liés au G7, un protagoniste.
À la veille du sommet du G7 sur l'agriculture, les Nations unies et notamment l'IFAD (Fonds international de développement agricole des Nations unies) applaudissent à l'initiative italienne car "la première ligne d'action contre le changement climatique, la faim et la pauvreté commence par les petites communautés rurales d'Afrique". C'est le message lancé par Alvaro Lario, président du Fonds international de développement agricole des Nations unies (IFAD). "Investir dans les petits exploitants agricoles et les entrepreneurs ruraux - il a declaré aavant de se rendre en Sicile - est le moyen le plus efficace de libérer l'immense potentiel de l'agriculture et des systèmes alimentaires africains pour tous".
En rencontrant la presse en marge de l'Assemblée Générale des Nations Unies (UNGA), Lario a aussi annoucé que à l'occasion du G7 Agriculture l'IFAD soutiendra les investissements et les politiques qui privilégient les pratiques agricoles durables, aident les agriculteurs à s'adapter au changement climatique et renforcent leur résilience. Selon l'IFAD les rendements agricoles diminueront de 25 % d'ici la fin du siècle en raison du changement climatique. Alors que des millions de jeunes entrent chaque année sur le marché du travail en Afrique, le président Lario soulignera également que la numérisation, les compétences vertes et la technologie, ainsi que l'accès au financement, peuvent rendre les zones rurales plus attrayantes pour les jeunes et les aider à créer de petites entreprises le long des chaînes de valeur alimentaires.
Interviewée par Internationalia, Federica Cerulli Irelli, directrice des partenariats de l'IFAD, a souligné l'importance de l'attention donnée à l'Afrique par le G7. "Nous sommes heureux de cette attention portée à l’Afrique. C'est quelque chose que nous avons remarqué, tout comme nous avons remarqué l'implication des jeunes dans un hackathon qui précédera le forum lui-même. Des jeunes des pays du G7 se retrouveront pendant une journée entière pour discuter de diverses questions, également accompagnés par des agences des Nations Unies comme l'Ifad. Et à cette occasion, nous parlerons des défis des jeunes agriculteurs qui vivent dans les zones rurales des pays en développement, notamment en Afrique. Placer l’Afrique et la jeunesse au centre de l’attention est le signe d’une grande inclusivité".
Quels seront à votre avis les autres enjeux fondamentaux dans le cadre de ce G7?
Un thème très important sera celui de l'innovation et de la recherche ; nous parlerons de l'intelligence artificielle et de son applicabilité à ce qu'on appelle l'agriculture de précision. Parfois, le facteur technologique crée un fossé entre les économies développées et les économies moins développées. Dans ce cas, cependant, dans les pays où les ressources naturelles sont également rares, l'utilisation de l'intelligence artificielle pour une utilisation efficace et efficiente de l'eau, par exemple pour l'irrigation ou les engrais, est cruciale pour aider à produire de manière meilleure et plus efficace. Ces technologies trouvent également leur place dans la pêche et l’aquaculture. Il y a des facteurs de durabilité environnementale dans la pêche que nous devons prendre en compte, en plus de l'aspect nutritionnel, et la technologie peut y contribuer.
Pensez-vous qu’il existe un écart de compréhension entre l’Occident et l’Afrique sur les questions d’agriculture et de développement rural ?
Il n’y a aucune lacune dans la compréhension, le multilatéral a un rôle de facilitateur et le FIDA, en tant qu’institution financière mondiale, a précisément ce rôle. Nous prenons des fonds auprès des grandes économies - mais pas seulement - et, comme c'est le cas dans une coopérative, nous les redistribuons en fonction des besoins et des exigences dans le but de réduire la pauvreté dans les zones rurales.
À l’heure où les besoins de financement se font sentir à plusieurs niveaux, quel peut être le rôle du secteur privé ?
Dans l'agriculture, le secteur privé est fondamental. Le partenariat public-privé a toujours été déterminant. Le secteur public a un rôle très précis de régulation, de création des conditions dans lesquelles le secteur privé peut intervenir. Et dans un secteur comme l’agriculture, créer les bonnes conditions signifie aussi, par exemple, atténuer les risques grâce à ce que l’on appelle désormais le financement mixte. L'objectif est également d'utiliser des fonds publics pour aider les investisseurs privés qui souhaitent investir de manière durable, pour les aider à réduire le risque de leur investissement, qui dans certains pays est très élevé également en raison de l'impact du changement climatique, des infrastructures sous-développées., avec des problèmes logistiques. Le continent africain connaît de forts taux de croissance démographique et possède en même temps le pourcentage de terres incultes le plus élevé au monde…
À mon avis, un thème africain est celui de l'attribution des terres et de la création de conditions pour que la terre soit cultivée, certes, mais devienne un atout capable de créer du développement et d'éliminer la pauvreté, également grâce au potentiel qu'elle a à absorber autant de main d’oeuvre. La technologie répond plutôt à la nécessité de réduire l’impact du changement climatique, tout en permettant une augmentation de la production.
Que pensez-vous de la souveraineté alimentaire ? C'est un sujet que la présidence italienne du G7 entend mettre sur la table...
Pour l’IFAD, la souveraineté alimentaire a une signification assez locale, dans le sens où nous visons à valoriser les cultures agricoles locales, les marchés locaux, le pouvoir qu’a la diversification agricole pour soutenir les populations locales. Cela ne signifie pas s’enfermer dans ses propres frontières. Nous ne voulons pas fermer les marchés, au contraire nous voulons les ouvrir, mais en même temps nous voulons que les pays en développement soient un peu plus autonomes. Aussi parce que la dépendance des pays en développement à l’égard des importations, notamment alimentaires, a un effet assez important sur les balances des paiements, et donc sur l’endettement extérieur. S’endetter, c’est avoir moins d’argent à investir dans d’autres priorités, autrement dit se retrouver coincé dans un cercle vicieux.
A savoir, l'IFAD s'est engagé à investir dans les populations rurales en Afrique pour transformer le secteur agricole et promouvoir le développement rural. Dans son cycle de projets 2025-2027, jusqu'à 60 % du financement de base sera investi sur le continent. En Afrique, 20 % de la population, soit une personne sur cinq, est sous-alimentée ou souffre de la faim, ce qui touche au total environ 300 millions de personnes.