(AGI) - Dans le cadre du sommet de l’OTAN qui s’ouvrira demain à Washington, les dirigeants des pays membres seront appelés non seulement à confirmer leur soutien à l'Ukraine, mais aussi à proposer une nouvelle approche dans la région méditerranéenne et en Afrique.
L'Italie, par l'intermédiaire de la première ministre Giorgia Meloni et du ministre des Affaires étrangères Antonio Tajani, insiste sur la nécessité pour l'Alliance atlantique de ne pas perdre de vue ce que l'on appelle le Flanc Sud, sans pour autant négliger le Flanc Est, et sur l'importance de continuer à garantir un soutien maximal à Kiev. Jusqu'à présent, l'Alliance a montré une certaine vulnérabilité dans son action au Moyen-Orient et en Afrique : pourtant, ce qui se passe dans ces deux régions - au Sahel en particulier - a une influence non négligeable sur la sécurité des États membres de l'OTAN.
Dans ce domaine, on a assisté ces dernières années à une avancée décisive de la Russie et de la Chine, des acteurs tiers qui ont poursuivi l’objectif de consolider les relations politiques, économiques et commerciales avec les gouvernements locaux. La Russie et la Chine, quant à elles, ont précisément exploité l'incapacité de l'Occident et de l'OTAN, en tant qu'organisation collective, à garantir la stabilité régionale. Une faiblesse largement imputable à la France qui, ces dernières années, a été contrainte à un repli décisif sur un territoire que Paris a souvent considéré comme son "arrière-cour". Dans ce contexte, Moscou et Pékin ont opéré de manière différente mais, sans le vouloir, synchronisée.
Ainsi, la Chine l’a fait par le biais d'investissements et de projets de développement, Moscou en prônant une approche anti-impérialiste et anti-coloniale qui a été mise en œuvre dans le domaine de la sécurité par le groupe Wagner, aujourd’hui renommé Africa Corps. Dans ce contexte, l'OTAN sera donc également appelée à agir pour essayer d’éviter certains des effets contre-productifs du renforcement de la présence russo-chinoise dans la région : du risque d'une majeure pression migratoire irrégulière à l'augmentation des prix des matières premières, en passant par l'intensification de la menace terroriste.
Depuis 2010, l'OTAN s'est tournée vers l'Afrique avec deux objectifs en tête : la coopération en matière de sécurité et la gestion des crises communes. Le but de cette approche était d'assurer la stabilité dans le voisinage Sud, principalement par le biais du dialogue méditerranéen, un outil que l'Alliance a utilisé avec les pays partenaires de l'Afrique du Nord.
Dans ce contexte, l'Alliance a cherché à intensifier la coopération en matière de lutte contre le terrorisme et les réseaux criminels internationaux, avec des résultats positifs, notamment dans la lutte contre l'extrémisme djihadiste dans des pays comme la Tunisie et l'Égypte. Cette évolution a toutefois contribué à pousser certains réseaux terroristes vers la région du Sahel, entraînant une forte instabilité dans cette région. Sur le front de la gestion des crises, cependant, la capacité de l'OTAN s'est avérée beaucoup plus limitée, ce qui a incité certains États à lancer des opérations bilatérales, par exemple l'opération française Barkhane au Mali, sans obtenir les résultats espérés.
Jusqu'à présent, l'OTAN a manqué d'une approche cohérente sur le Flanc Sud, et cela principalement car les différents intérêts des pays alliés ont empêché l'adoption d'une politique commune.
Dans ce contexte, un changement de cap pourrait être porté par l'Italie, qui accueille depuis 2017 le Hub de la Direction stratégique Sud de l'OTAN à Naples : ce centre, entièrement dédié à l'action en Méditerranée, pourrait contribuer à améliorer la capacité de l'Alliance à opérer sur le Flanc Sud. En novembre dernier, le secrétaire général sortant de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a confié à un groupe indépendant de onze experts la tâche de rédiger un rapport sur l'approche à l'égard des pays dits du "voisinage Sud".
Le rapport, publié en avril et qui a déjà fait l'objet de discussions lors de la récente réunion des ministres des Affaires étrangères, présente une série de propositions, dont celle de nommer un envoyé spécial qui sera chargé de suivre les activités de l'OTAN dans la région. Un objectif, ce dernier, que l'Italie défend dans l'espoir qu'une décision en ce sens émerge du sommet de Washington. Une deuxième proposition concerne la convocation périodique d'un sommet avec les partenaires du Flanc Sud, ainsi que le renforcement des capacités de la Direction stratégique Sud de l'OTAN, à Naples. Le groupe d’experts a également proposé de créer une représentation auprès de l'Union africaine, ce qui permettrait de souligner la dimension politique de l'OTAN.
Pour atteindre cet objectif, il faudra toutefois que les alliés de Washington agissent de concert et de manière cohérente : un objectif délicat à atteindre, étant donné les différentes perceptions du problème qui sont déterminées par la position géographique des divers pays membres. L'Italie s'efforcera de jouer un rôle de premier plan à cet égard, en s'appuyant également sur la présidence tournante du G7. Le forum de cette année a d’ailleurs mis l'accent sur le renouvellement des relations avec l'Afrique, en particulier dans le cadre du Plan Mattei.